
Mai 2025
La Commission « Pour nos enfants et nos adolescents : soutenir la parentalité » a été mise en place par la ministre des Solidarités et des Familles le 11 décembre 2023. Co-présidée par Serge HEFEZ, psychiatre des hôpitaux, psychanalyste, thérapeute familial, et essayiste et Hélène ROQUES, experte en responsabilité sociale et environnementale, cette commission a présenté son rapport à Mme Catherine Vautrin, ministre du Travail, de la Santé, des Solidarités et de Familles, le 13 février 2025.
Il constitue en soi l’unique rapport de ces dernières années portant sur la parentalité dans sa globalité.
Dans ce rapport, la commission estime qu’il est « nécessaire de modifier la perspective traditionnelle de la politique de soutien à la parentalité »en créant notamment un droit à la parentalité. Le rapport présente 40 mesures permettant de restaurer la place des parents dans une société partenaire. Ces propositions s’articulent autour de sept valeurs : l’égalité, l’équité territoriale, la prévention, l’inclusion, la coopération, l’équilibre, la diversité.
Ses lignes directrices et ses recommandations s’appuient sur les rapports existants et 90 auditions conduites en complément. Auditionné en mai 2024, le Collectif Parentalité a réaffirmé la nécessité d’une politique de soutien à la parentalité centrée sur l’accompagnement des parents, par la reconnaissance de leurs rôles d’éducateurs de leur enfant, et de la valorisation de leurs ressources. Il a défendu la nécessité de prendre en compte le contexte familial, social, sociétal, économique et culturel pour adapter les postures et formes d’accompagnement à la singularité des besoins de chaque parent.
Le rapport s’inscrit en cohérence avec les valeurs du Collectif parentalité et dans la lignée de ses revendications en :
- défendant dès la première recommandation la nécessité de mettre les parents au cœur de la politique de soutien à la parentalité, et de faire des parents des partenaires de la société dans un esprit de coéducation et d’universalisme ;
- proposant un autre point de vue sur l’exercice de l’autorité parentale et sur la responsabilité des parents, tenus pour responsables exclusifs, dans les débats politiques et parlementaires en cours, des comportements inappropriés, délictueux et parfois criminels de leurs enfants ;
- rappelant que le soutien aux parents nécessite de s’adapter à chaque situation et contextes de vie (en particulier la pauvreté, la migration, le handicap, la monoparentalité…) et que les schémas préétablis à appliquer de façon systémique auprès des familles sont à éviter ;
- appelant à la mise en œuvred’une stratégie nationale en faveur de la parentalité, soutenue par la création d’une Commission interministérielle permanente dédiée ;
- regrettant l’inégale répartition des services, notamment les Laep, sur le territoire national et de ce fait leur manque d’accessibilité pour certaines familles.
Deux ans après l’alerte lancée[1] par le Collectif Parentalité sur le danger d’un discours politique qui accable les parents et le risque de discrédit sur leurs capacités éducatives induit par les propos et les mesures annoncées à la suite des violences urbaines, ce rapport permet de poser un nouveau diagnostic et un nouvel horizon pour construire cette stratégie nationale.
Le regard du Collectif parentalité sur certaines mesures
Le Collectif parentalité soutient plus spécifiquement 6 mesures, parmi les préconisations de ce rapport :
- La garantie d’une offre socle de services d’accompagnement à la parentalité identique sur tout le territoire national, première pierre vers une universalité de l’accueil et de l’accompagnement (mesure 6), sous réserve, pour le Collectif, que celle-ci soit non lucrative ;
- La valorisation de l’existant en incitant à renforcer les services et les bonnes pratiques développées localement (mesure 8) ;
- L’importance de confier à la Cnaf la gestion d’un fonds d’innovation (mesure 12). En effet, selon le Collectif, les acteurs locaux, dont les associations, en lien avec les parents, sont à même de proposer et construire des propositions prenant en compte les évolutions sociales et sociétales constantes, qui nécessitent une adaptation et une souplesse de réponse permanentes ;
- La reconnaissance du besoin de soutien et de réhabilitation des ressources et des compétences des parents en favorisant notamment la « pair-aidance » entre parents (mesure 34) ;
- La promotion des actions de prévention et de résolution des problèmes éducatifs dans un cadre familial en amont de l’intervention de la protection judiciaire (mesure 36) ;
- L’invitation à « permettre aux associations d’obtenir des financements pluriannuels pour travailler dans la durée ainsi que d’inciter les associations à s’appuyer sur les fédérations nationales pour accroître leur niveau de compétences » (mesure 38). Selon le Collectif, cela permettrait de répondre à un enjeu de recrutement de professionnels, dont des travailleurs sociaux, pour déployer des services de soutien des parents, et favoriser les actions.
Le Collectif parentalité pointe néanmoins le manque de préconisations concernant le cadrage financier, politique et institutionnel permettant le déploiement de l’ensemble de ces mesures, qui pour certaines existent mais sont à l’heure actuelle confrontées à des difficultés de pérennisation.
Il souhaiterait que le soutien et l’accompagnement des pères fassent l’objet d’une attention volontariste afin de renforcer leur prise en compte dans les politiques d’accompagnement à la parentalité.
Quelles suites seront données à ce rapport ?
Alors que ce rapport a été présenté à Mme Catherine Vautrin, ministre du Travail, de la Santé, des Solidarités et de Familles, le 13 février 2025, le Collectif parentalité s’inquiète de l’absence de réaction[1] et d’annonces concrètes sur les suites données afin d’améliorer concrètement l’exercice de la parentalité en France. Une interrogation d’autant plus justifiée à l’heure de la mise en place du Service public de la petite enfance mentionnant le soutien à la parentalité comme faisant partie de ses missions.
C’est pourquoi le Collectif appelle une nouvelle fois de ses vœux la définition d’une politique publique ambitieuse de soutien à la parentalité qui s’appuierait sur l’esprit dans lequel s’inscrivent ce rapport et ses recommandations. Un engagement politique concret accompagné de moyens financiers conséquents est nécessaire pour que ces mesures ne restent pas des intentions.
Il appelle enfin à un dialogue renforcé avec les pouvoirs publics et reste engagé et disponible pour prendre part à l’élaboration d’une stratégie nationale de soutien à la parentalité assortie d’une feuille de route opérationnelle et pluriannuelle.
Le « Collectif parentalité » regroupe 12 acteurs associatifs agissant dans le champ du soutien à la parentalité : ACEPP, ADMR, APPRENTIS D’AUTEUIL, ATD QUART MONDE, FAMILLES RURALES, FCSF, FFER, FNAAFP/CSF, FNEPE, LES PÂTES AU BEURRE, UNAF, UNIOPSS.
[1] Tribune du collectif parentalité « Les parents, incriminés et oubliés des politiques publiques » – Fnepe – Écoles des parents et des éducateurs ou Education : « Quel que soit son milieu social et culturel, tout parent est confronté, à un moment ou à un autre, à des difficultés »
[2] Le rapport n’ayant pas, à ce jour, fait l’objet d’une publication sur le site du Ministère.
